Le "choc en retour" décryptéDe quoi s'agit-il ? Comme tout domaine, l'Art magique est fait de lois et de règles, tantôt contraignantes pour les uns, tantôt considérées comme logiques pour les autres. Cependant, à trop se conditionner par des faits établis, on finit par s'aveugler et s'enfermer dans une rigidité qui risquerait, à terme, de bloquer toute pratique constructive. Certains disent que les lois sont faites pour être contournées. Faut-il accepter ce fait en Magie également ? La peur, peu importe de quoi, est à l'origine des blocages et de la plupart des lois qui brident nos pratiques. Je ne prône pas bien entendu une totale libération sans conscience de nos actes, mais propose une vision différente des choses. Appliquer une loi n'est rien si l'on ne cherche pas à remonter au préalable à sa source. Sans doute la loi du triple choc est-elle l'une des plus connus en matière de Magie bénéfique. Or, et beaucoup l'ignorent, celle-ci tire sa source uniquement dans la tradition Wiccane, avant de n'avoir été intégrée que bien plus tard par des croyances plus générales, comme un garde fou pour, sans doute, se donner bonne conscience. A l'heure actuelle, la plupart des pratiques magiques sont un melting-pot de diverses croyances dont les sources sont bien souvent trop effacées, et c'est d'ailleurs bien là que réside la majeure partie du problème. Certains l'appellent la Loi du Triple Choc, d'autres la Loi du Choc en Retour ou encore la Loi de l'Equilibre ; peu importe son nom, cette loi avance le fait que toute action entraîne une réaction et que tout ce que l'on fera nous reviendra par trois fois. Nature du retour et couleurs de la magie Pourtant, comment pouvoir envisager une seule seconde que nos actions puissent engendrer un retour, négatif ou bénéfique, selon leur nature ? Cela équivaudrait à réintroduire la notion de couleur dans nos pratiques, notion que l'on tente pourtant de mettre de côté au maximum dès lors que l'on cherche à dépasser les carcans imposés par les symbolismes de base. Ainsi, à en croire le triple retour, toute pratique bénéfique générerait un retour bénéfique, quelle que soit sa forme, et tout action maléfique, au contraire, serait renvoyée à l'"expéditeur", décuplée par trois fois. Là encore, qui, ou quoi, serait capable de juger des orientations des actes d'autrui ? Qui serait à même de tenir la balance de notre propre procès, si ce n'est nous-même ? C'est pourtant ce genre d'interrogations qui devraient nous amener tout naturellement à chercher les sources de ce triple retour tellement craint d'une grande partie des pratiquants. Paradoxalement, se plonger dans l'étude des arts occultes permettrait à quiconque mettrait un peu de sérieux la tâche de se détacher de la peur de l'inconnu qui hante la plupart de ceux qui rejettent la magie. Pourtant, comment expliquer dans ce cas la crainte parfois maladive d'un éventuel retour de nos actes ? Bonne conscience ? Conditionnement ? Et si cette loi était née, elle aussi, d'une peur de l'inconnu générée inconsciemment ? Avoir un pied dans la Magie ne signifie pas nécessairement avoir illuminé l'intégralité du chemin. Comment expliquer que la plupart des néophytes redoutent le triple retour, alors que d'autres pratiquants, plus confirmés, en font fi, ou tout du moins savent mieux l'appréhender ? Se lancer dans l'inconnu d'une pratique toute nouvelle pour soi entraîne, quoi qu'on en dise, une nouvelle peur de l'inconnu, différente il est vrai de celle de l'ignorance, mais peut-être plus dangereuse dans le sens ou elle bride l'apprentissage. Se réfugier derrière le triple retour serait alors un moyen de "se couvrir" pour être certain que rien de néfaste ne puisse arriver, comme si tenter de se conformer aveuglément à une loi suffisait à faire un pas de plus dans son évolution personnelle. Or, à force de réflexion, le triple choc apparaîtrait sans doute moins effrayant : "connaître" permet de ne plus se retrouver face à une inconnue, c'est une manière en quelque sorte de cerner ce que l'on redoute, à savoir d'éventuelles répercutions sur nos actes. Ainsi, avec le temps et la pratique, à force d'apprentissage on finit par connaître et non plus par "redouter"... Redouter une loi, c'est rester dans l'ignorance de sa signification, s'aveugler face à quelque chose qui nous effraie. Comprendre une loi permet de l'assimiler et ainsi de l'accorder à nous croyances. Jugement des actes Nous sommes seuls juges de nos actes, rien ni personne ne saurait nous accuser de "bonté" ou de "méchanceté" pour la simple et bonne raison que personne n'est à même de se mettre à notre place. Ainsi, le seul facteur susceptible de nous renvoyer ce fameux retour est notre propre conscience de nos actes. Croire à un jugement extérieur à nous c'est émettre l'hypothèse que nous ne serons jamais libres de tracer notre voie et s'en remettre à une entité inexistante. Risquer une telle chose revient à envoyer, lors d'une action magique, en plus de notre propre énergie orientée vers le but choisi, une part de notre peur inconsciente qu'un retour surviendra ; c'est apporter des pensées négatives là où elles ne devraient pas apparaître, pensées qui, elles seules, apporteront le choc tant redouté. Se croire à l'abri d'un retour n'est pas non plus la bonne solution pour autant. S'il ne survient pas naturellement sur notre route – notion de cause à effet simple, mettant hors de propos la notion de jugement personnel mais préférant appeler un retour à l'Equilibre des énergies mises en œuvre – peut-être le ressentirons nous dans une vie future. Peut-être la vie que nous menons actuellement est-elle le résultat de nos actes et d'un retour dans l'une de nos vies passé, comme une sorte de mise à l'épreuve pour évoluer. Dans cette hypothèse il n'y a, comme nous le disions plus haut, aucun autre juge que soi même. Ma théorie est qu'entre chaque vie, nous prenons en compte nos actes passés afin d'en intégrer le résultat dans notre vie future, comme si, en quelque sorte, nous créions nous-même les facteurs qui composeront notre vie future, dans le but d'apprendre de nos erreurs et de ne pas les commettre une seconde fois. "Triple ?" Le concept de trinité, quant à lui, est bien trop souvent pris pour argent comptant. Comment pourrait-on décemment tripler les retours d'actes qui, à la base, n'ont pas tous la même valeur ? Chaque action entraîne une réaction qui lui est proportionnelle, le chiffre 3 n'ayant été intégré que par pur symbolisme. Nombreuses sont les significations du chiffre trois dans le domaine de l'ésotérisme, et ce dans de nombreuses croyances : 3 aspects de la Déesse Wiccane (Vierge, Mère et Vieille), trinité chrétienne (Père, Fils et Esprit Saint), 3 temps (passé, présent, futur) aussi associé aux 3 Nornes ou encore les trois Parques du Panthéon romain, Clotho, Lachésis et Atropos. La liste pourrait encore énormément s'allonger dans cette optique symbolique mais, pour réellement comprendre son importance, peut-être faut-il se pencher également vers un autre genre d'interprétation. Le Choc en retour, censé être la conséquence moralisatrice de nos actes pourrait très clairement s'associer au chiffre 3 dans la mesure ou celui-ci est le résultat de 2+1, comme s'il évoquait le résultat d'une action réfléchie (peser le pour et le contre (2) avant d'agir (1).). Nous serions donc responsables de nos actes après réflexion, puisqu'ils ne découlent que d'un choix que nous avons fait de les accomplir. C'est certainement dans cette optique qu'il faudrait considérer la triplicité du choc et non pas comme un degré d'intensité du retour lui-même. Par Yuna Minhaï |